Aujourd’hui, l’Assemblée nationale se prononce sur une résolution dite Maillard qui, au nom de la lutte contre l’antisémitisme, entend faire adopter par la France la définition de l’antisémitisme formulée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste. Les exemples de ce qui de ce fait, demain, pourrait alors être condamné sont inquiétants car ils tissent un lien entre critique de la politique menée par Israël et antisémitisme.
Je partage sans réserve le combat contre l’antisémitisme dont nous savons qu’il progresse tragiquement en France aujourd’hui. Ce combat est le mien. Cette résolution dite Maillard ne contribuera pas à faire reculer l’antisémitisme : elle amalgamera antisionisme et antisémitisme. C’est d’ailleurs ce que développe la très juste tribune d’intellectuels juifs parue dans Le Monde (voir ci-dessous).
En associant critique de la politique israélienne et haine des juifs, en faisant peser sur l’expression d’une parole politique l’ombre infamante du racisme, en pénalisant finalement la pensée critique, en allant jusqu’à nier l’antisionisme de nombreux juifs, cette résolution fait fausse route. Avec elle, pourront être considérés comme antisémites celles et ceux qui s’engagent en faveur d’une solution binationale au conflit israélo-palestinien ou qui condamnent la politique d’apartheid menée par Israël.
Il y a une semaine, Israël expulsait le directeur américain de l’ONG Human Right Watch car celui-ci invitait les entreprises à se retirer des colonies israéliennes jugées illégales par l’ONU. Au même moment, les États-Unis de Trump franchissaient une terrible ligne rouge en reconnaissant comme légale la colonisation. Dans ce contexte, l’extrême droite israélienne au pouvoir continue de vouloir faire taire les oppositions politiques pour mieux poursuivre son entreprise de domination du peuple palestinien. Cette résolution entre en résonance avec la volonté du gouvernement israélien de faire passer les Palestiniens pour des antisémites. Elle s’inscrit dans le prolongement de la parole du président Macron qui a affirmé que « l’antisionisme est la forme réinventée de l’antisémitisme ». On ne s’étonnera pas qu’elle soit proposée par un député qui a tenu en mai dernier une conférence avec le Président des colonies du nord de la Cisjordanie, colonisation pourtant condamnée par la France depuis 1967 et jugée illégale au regard du droit international.
C’est la justice, la liberté, les droits qui permettent de protéger tous les peuples opprimés et qui fondent le combat contre toutes les formes de racismes. En servant la polémique et en permettant de condamner une opinion politique, cette résolution abime tous les efforts en ce sens, alors qu’ils sont rendus impérieux si l’on veut à la fois lutter contre l’antisémitisme et dégager une solution de paix durable entre les Palestiniens et les Israéliens.