« On devrait pouvoir s’offrir quelques années de printemps » Marguerite Duras

À celles et ceux qui peuvent, qui aiment lire…

Clémentine Autain

La trêve estivale est toujours pour moi l’occasion de lire, notamment de la littérature dont j’ai un besoin viscéral, mais pas seulement. Au terme d’une phase de repos, avant de reprendre la vie politique en participant aux universités d’été d’EELV puis de la France Insoumise, me vient l’envie de vous faire partager quelques livres qui m’ont passionnée (vous noterez que je ne dirais rien de ceux que je n’ai pas aimée… je ne suis pas critique littéraire… !).

D’abord, sur les conseils aussi insistants qu’amicaux de l’historienne Mathilde Larrère, j’ai dévoré l’autobiographie détonante de la sociologue Rose-Marie Lagrave, « Se ressaisir ». Son récit fonctionne comme une enquête sur son parcours de transfuge de classe. Comment une femme née au lendemain de la seconde guerre mondiale, issue d’une famille très nombreuse, ayant grandi en ruralité, dans la pauvreté, est-elle devenue directrice d’études à l’EHESS ? Ce n’est pas l’histoire d’une femme extraordinaire ayant tout bravé et tout réussi mais plutôt celle des interstices dans lesquels l’auteure a réussi à se faufiler. Ce livre nous parle de l’école, de la ruralité, du féminisme, de la maternité, des institutions… Vraiment réussi.

J’ai enfin pris le temps de me plonger dans l’univers de Svetlana Alexievitch. Il y a bien longtemps qu’on me l’avait conseillé et conseillé encore… Prix Nobel de littérature en 2015, cette auteure produit une œuvre tout à fait originale, à la croisée de l’histoire, de la sociologie, de la politique et du romanesque. Svetlana Alexievitch donne la parole à des personnes aux parcours, aux histoires, aux sensibilités très diverses. Elle entremêle leurs témoignages pour saisir, dans une polyphonie de douleurs et d’espoirs, de violences et d’amour, les émotions liées à une époque, et donc la réalité vécue d’un événement. J’ai commencé par « La supplication » sur les conséquences de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl. Incroyable. J’ai enchainé avec « La Fin de l’homme rouge », qui recueille des centaines d’entretiens sur le basculement opéré avec la perestroïka dans les années 1990. Ou comment prendre la mesure de ce que recouvre le rêve de liberté mais aussi la nostalgie soviétique, l’incompréhension devant le règne de la marchandise ou encore la présence persistante de la guerre dans les imaginaires. Sublime.

Comme beaucoup d’entre vous, j’ai adoré « L’inconnu de la poste » de Florence Aubenas. C’est l’histoire réelle d’un crime dans un petit village, en pleines montagnes du Jura, sur lequel la journaliste a enquêté pendant sept ans et qu’elle transforme en roman social. On apprend sur la réalité contemporaine, on est suspendu comme dans un polar, on se régale de l’écriture et de la subtilité du regard. Je comprends le succès…

J’ai par ailleurs été bouleversée par le roman de Sandrine Collette, « Ces orages-là ». Une femme, jeune boulangère dans le Morvan, réussit à quitter son conjoint violent. Mais suffit-il de partir pour sortir de l’oppression ? Sandrine Collette restitue les sentiments et les angoisses de cette femme qui s’échappe. Nous sommes embarqués dans son cauchemar, dans ses obsessions. Et c’est glaçant.

J’en termine par un petit livre drôle, « Honoré et moi » de Titiou Lecoq. C’est une biographie toute personnelle d’Honoré de Balzac, que l’on (re)découvre en looser magnifique. J’ai appris et beaucoup ri.

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