« On devrait pouvoir s’offrir quelques années de printemps » Marguerite Duras

« Au lieu de répéter que nous sommes en guerre, donnons-nous les moyens d’atteindre la paix »

Clémentine Autain

Nous vivons un moment exceptionnel de tensions et d’inquiétudes. Ce soir, j’en ai mesuré l’ampleur en discutant avec plusieurs professeurs, en grève ou tout simplement inquiets des conditions d’enseignement, et en écoutant mes enfants me raconter la minute de silence pour Samuel Paty puis me parler des mesures sanitaires à l’école. Je me demande quelles sont, et quelles seront dans l’avenir, les traces d’une enfance marquée par des évènements aussi tragiques. Parler de décapitation, de menace terroriste, de morts du Covid 19, de contraintes sur les libertés, c’est parler d’un monde qui fait terriblement peur.

Ces réalités ne sont pas ailleurs, elles sont ici et maintenant. Les personnels soignants se débattent pour sauver les malades, épreuve terrible dans ces hôpitaux si abîmés par des décennies d’austérité. La colère se propage chez les commerçants menacés de mettre la clé sous la porte pendant que les hypermarchés ou Amazon s’apprêtent à faire une nouvelle fois le plein. La tristesse se répand chez les personnes seules, âgées, angoissées pendant que la jeunesse se trouve empêchée de vivre, tout simplement. Le désespoir s’empare de tous ces foyers qui, laminés par la crise économique, basculent dans l’extrême pauvreté.

Au milieu des catastrophes et des monstres, je me dis qu’il faut non seulement résister mais continuer à rêver et à espérer. J’aimerais que nous trouvions le goût résolu de l’essentiel, de ce qui fait le plaisir et le sel de l’existence, pour organiser la société autour de ces besoins. Que nous développions la solidarité et l’entraide, loin du repli et de la haine. Que nous sachions défendre la raison, véritable rempart face au complotisme et à l’obscurantisme. Au lieu de répéter « nous sommes en guerre », il faut se donner les moyens d’atteindre la paix.

Clémentine Autain

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