TRIBUNE – Clémentine Autain signe avec deux personnalités de la France insoumise, dont Manon Aubry, tête de liste aux élections européennes, une tribune en réponse à Marlène Schiappa et Nathalie Loiseau, qui proposaient de défendre les droits des femmes à travers un « pacte Simone Veil ».
Le Journal du Dimanche publie la tribune signée par Manon Aubry, tête de liste de la France insoumise aux européennes, Clémentine Autain, députée de Saint-Saint Denis, et Prune Helfter Noah, juriste, ancienne élève de l’ENA et candidate FI aux européennes. Elles répondent à la tribune publiée dimanche dans le JDD par la tête de liste LREM Nathalie Loiseau, la secrétaire d’Etat chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, et la candidate LREM Chrysoula Zacharopoulu. Elles y proposaient d’instaurer un « pacte Simone Veil » à l’échelle européenne pour « harmoniser par le haut les droits des femmes en Europe en incitant les États membres à introduire dans leur législation les mesures les plus avancées ayant fait leurs preuves ».
« Madame Loiseau, Madame Schiappa,
Vous réclamant à la fois de Gisèle Halimi et de Simone Veil, vous prétendez promouvoir les droits des femmes au sein de l’Union européenne en appliquant la ‘clause de l’Européenne la plus favorisée’. Mais votre plaidoyer est vain dès lors qu’il s’inscrit dans le cadre de la politique austéritaire et de destruction des services publics mise en œuvre avec zèle par le président Macron sous l’égide de la Commission européenne.
En 20 ans, le nombre de maternités a diminué de moitié en France. Ce scandale sanitaire se double d’un autre, moins médiatisé : ce sont autant de centres pratiquant les interruptions volontaires de grossesse (IVG) qui ont également disparu, rendant toujours plus compliqué l’accès à l’avortement. La baisse des moyens humains et matériels de l’hôpital public crée des délais d’attente de plus en plus longs, qui induisent trop souvent des dépassements du délai légal dans lequel l’avortement est autorisé. Tout cela oblige certaines femmes à poursuivre une grossesse non désirée ou bien à recourir aux services médicaux des pays voisins, voire à recourir à des pratiques mettant leur santé en danger.
Plus globalement, la destruction des services publics dans le secteur de l’accueil des enfants, des soins aux personnes, des services sociaux, reporte sur les femmes l’obligation d’assurer tout ce qui ne l’est plus ou mal par la puissance publique. Le temps qu’elles consacrent à la sphère privée pour s’occuper des enfants et des aînés se fait au détriment du travail rémunéré et explique le recours croissant au temps partiel, toujours essentiellement féminin : 30% des femmes travaillent à temps partiel en France, contre moins de 8% des hommes.
Quant à votre volonté affichée de lutter contre les violences faites aux femmes, elle serait plus crédible si votre gouvernement n’avait pas décidé de supprimer les tribunaux d’instance (TI), ce qui, inévitablement ne fera qu’aggraver l’engorgement des tribunaux de grande instance (TGI) qui instruisent les plaintes des femmes victimes de violence conjugale.
Enfin, la posture féministe que vous affichez s’accommode mal du refus récent du président Macron de mieux rémunérer le congé parental, proposition figurant dans un projet de directive de la Commission européenne actuellement en discussion. Raison invoquée : trop cher!
Mesdames, le féminisme ne se paie pas de mots. L’utra-libéralisme que vous défendez est incompatible avec l’émancipation des femmes, en France comme en Europe. »