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RSA : en faire un dispositif barrière contre la grande pauvreté

Clémentine Autain

Mme Clémentine Autain appelle l’attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la possible nationalisation du financement du Revenu de Solidarité Active, sur sa revalorisation et sur l’élargissement de ses critères d’attribution. Cette interpellation fait sens à l’heure de la crise sanitaire et sociale qui agite le pays, et exige de l’État, garant du droit social, une réponse massive et chiffrée.

Faute de compensation par l’État, les charges croissantes que représente le versement du RSA grèvent depuis des années les budget des collectivités, en aggravant leurs difficultés financières. Depuis 2010, les dépenses de RSA ont progressé d’environ 5% par an en raison de la hausse du nombre d’allocataires, et ont augmenté encore avec les revalorisations décidées entre 2013 et 2017. En 2017, les dépenses liées au versement du RSA ont ainsi représenté 10,8 milliards d’euros, compensés par l’État à hauteur de seulement 6 milliards d’euros. Cela a donc représenté un reste à charge de près de 5 milliards d’euros qui a dû être financé par les départements.

Cette situation est intenable. Les départements se trouvent privés de fonds qu’ils pourraient affecter à leurs missions (l’insertion, l’aide sociale à l’enfance…), et cela se traduit très concrètement par un défaut d’application de la solidarité nationale. Nous avons ainsi pu voir ces dernières années des départements moduler voire restreindre l’accès au RSA, parfois en le conditionnant à l’accomplissement d’une activité bénévole (dans le Haut-Rhin, par exemple), ou en accentuant leur contrôle des allocataires. D’autres départements ont menacé de ne plus verser le montant du RSA aux Caisses d’allocations familiales, faute de compensation de l’État.

Madame Autain insiste particulièrement sur les conséquences de ce fonctionnement pour le département de la Seine-Saint-Denis, où elle est députée et où vivent 82.000 allocataires du RSA – soit un quart du nombre total d’allocataires en Ile de France. Dans un département déjà ankylosé par l’absence de l’État, cette dépense supplémentaire pèse de tout son poids sur les autres budgets.

Alors de très nombreux Français sont menacés de précarité par la crise économique, il est urgent de veiller à redonner tout son sens à une allocation qui permet – difficilement – à de nombreux Français de garder la tête hors de la misère. C’est pourquoi Madame Autain alerte M. le ministre des solidarités et de la santé sur l’urgence qu’il y a à nationaliser le financement du RSA, à revaloriser franchement son montant (en l’indexant par exemple sur le revenu médian – les associations défendent un revenu convenable d’existence à au moins 870 euros par mois) et à élargir son attribution aux jeunes de moins de 25 ans, particulièrement touchés par la crise. Depuis le début du quinquennat, les mesures socio-fiscales du gouvernement ont jusqu’à présent amputé de 240 euros les revenus des 5% des Français les plus pauvres. Cette politique menée en faveur des plus riches est injuste et intolérable. Il est plus que temps de faire enfin du RSA un « dispositif barrière » efficace contre la grande pauvreté.

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